Le 3 décembre 2023, le Front de libération nationale kanak et socialiste (FLNKS) organise une manifestation contre la venue de Sébastien Lecornu, ministre de la Défense français. L’agence de presse d’Etat azerbaïdjanaise Azertag dépêche alors deux « journalistes ».

L'Azerbaïdjan s’est engagé depuis 2019 dans une nouvelle stratégie : coopter les mouvements indépendantistes en France, dans le cadre de sa présidence du Mouvement des Non-Alignés (jusqu’en janvier 2024). L’objectif est double : se donner l’image d’une nation anticoloniale, quelques mois après avoir vidé l’Artsakh de ses habitants, et déstabiliser la France, qui s’est positionnée contre lui. Pour cela, Ilham Aliyev créé par décret le Centre d’Analyse des Relations Internationales, en 2019, et nomme directeur l’ancien diplomate azerbaïdjanais Farid Shafiyev. Son but est de promouvoir la diplomatie de l’Azerbaïdjan par des publications et évènements.


Le Centre d’Analyse des Relations Internationales organise le 6 juillet 2023 la réunion de formation du Groupe d’Initiative de Bakou (GIB). Celui-ci sera dirigé par Abbas Abbasov, ancien haut-cadre du Fonds pétrolier d'État de la République d'Azerbaïdjan.

Le GIB regroupe des formations indépendantistes en France comme le FLNKS, le Parti pour l’Indépendance de la Polynésie française, Africa Mundus, l’Union du Peuple pour la Libération de la Guadeloupe, ou encore le Parti pour la Libération de la Martinique.

C’est dans ce contexte qu’après avoir organisé des conférences et événements à New-York et à Genève, le GIB veut couvrir les manifestations en Nouvelle-Calédonie. Le 3 décembre, les deux « journalistes » d’Azertag sont cependant interceptées par les services secrets français.



La première est connue des services de renseignement français pour sa proximité avec les services secrets azerbaïdjanais, mais est autorisée à entrer. La seconde « journaliste » est renvoyée vers Singapour. Azertag dénonce la censure de ses « journalistes » par la France.


L’une des deux « journalistes » s’avère sans doute être Shahla Aghalarova. Le 13 décembre 2023, elle publie sur Facebook une photo, sans description, de l’aéroport de Nouméa. Elle affirme sur son LinkedIn travailler depuis 2010 pour l’agence de presse Azertag.




Azertag accuse la France de censurer ses journalistes. Pourtant, il est manifeste que la soi-disant journaliste Shahla Aghalarova n’est pas ce qu’elle prétend être. Elle est une chroniqueuse régulière des événements organisés en France par l’ambassade d’Azerbaïdjan et le Centre culturel d’Azerbaïdjan. Dans ses articles sont vantés ces événements ainsi que certaines personnalités participantes.



Shahla Aghalarova apparaît non seulement près du président azerbaïdjanais Ilham Aliyev et de son épouse, Mehriban Aliyeva, mais également dernièrement, le 21 novembre 2023, avec l’ambassadrice Leyla Abdullayeva, avec laquelle elle pose pour la communication de l’ambassade. D’après son CV mis en ligne, elle aurait en effet été interprète pour Nicolas Sarkozy et François Hollande lors de leurs visites officielles en Azerbaïdjan.



Enfin, plus intéressant encore, Shahla Aghalarova figure parmi les créateurs de l’association de lobbying azerbaïdjanaise basée à Lyon, Dialogue France-Azerbaïdjan, présidée par Günel Safarova.

Shahla Aghalarova est donc sans doute, en France, la soi-disant journaliste d’Azertag, proche des services secrets azerbaïdjanais. Cela montre l’instrumentalisation par la dictature d’Aliyev de la presse pour atteindre ses objectifs de déstabilisation et d’influence.