Rachida Dati, ancienne Ministre de la Justice (2007-2009), maire du 7ème arrondissement de Paris depuis 2008 et Ministre de la Culture depuis le 11 janvier 2024, est une proche des représentants de l'Azerbaïdjan en France. Nous l'évoquions déjà dans nos publications dédiées à Olivier Pardo et à Adela Naibova.
Il est temps de faire un rappel chronologique de ces liens entre la dictature d'Aliyev et cette ministre, mise en examen depuis 2021 pour "corruption passive" et "trafic d'influence".
En novembre 2010, Rachida Dati annonce sur Facebook son départ pour l'Azerbaïdjan en "observation électorale", à l'occasion des élections législatives azerbaïdjanaises.



En avril 2011, Rachida Dati se rend à Bakou et rencontre le Conseil judiciaire et juridique de la République d'Azerbaïdjan. Elle profite de l'occasion pour appeler au renforcement de la coopération juridique entre la France et l'Azerbaïdjan.

Durant le même voyage en Azerbaïdjan, Rachida Dati rencontre l'épouse du dictateur Ilham Aliyev, Mehriban Aliyeva, avec qui elle se laisse prendre en photographie, et qu'elle remercie pour son invitation ainsi que pour la "promotion du droit des femmes" dans la société azerbaïdjanaise.

Elle rencontre, durant le même séjour à Bakou, le Ministre des Affaires étrangères d'Azerbaïdjan de l'époque, Elmar Mammadyarov, avec lequel il est dit qu'elle a échangé sur les domaines de l'énergie et des infrastructures.

En septembre 2011, Rachida Dati participe, aux côtés de Mehriban Aliyeva, à la Conférence "Azerbaïdjan : partenaire stratégique pour la sécurité énergétique européenne", au Bureau du Parlement européen à Paris. Elle affirme à cet événement que l'Azerbaïdjan est effectivement un partenaire stratégique de la France, et a loué ses "réussites" depuis son indépendance. Thierry Mariani, autre ponte du lobby de l'Azerbaïdjan en France, s'exprime également durant cette conférence.

En décembre 2011, Rachida Dati rencontre le dictateur d'Azerbaïdjan, Ilham Aliyev, et son épouse Mehriban Aliyeva à Bakou. Le lendemain, elle voit de nouveau le Ministre azerbaïdjanais des Affaires étrangères, Elmar Mammadyarov, avec qui elle exprime "sa satisfaction de sa deuxième visite en Azerbaïdjan" et souligne "le développement rapide qu’elle avait observé en Azerbaïdjan".


En février 2012 parait un article signé par Rachida Dati, intitulé "Relever le défi de la sécurité énergétique", dans la revue "Echanges Internationaux" de la Chambre de Commerce Internationale, à l'occasion de la parution d'un numéro hors-série dédié à l'Azerbaïdjan : "Azerbaïdjan : une économie en évolution rapide". Dans cette revue signent des articles l'ambassadeur de France en Azerbaïdjan de l'époque, Gabriel Keller; l'ambassadeur d'Azerbaïdjan en France de l'époque, Eltchin Amirbeyov; Mehriban Aliyeva; le Ministre français de l'Industrie, de l'Economie et de l'Economie numérique de l'époque, Eric Besson; le Ministre français des Transports de l'époque Thierry Mariani; le vice-président de la Chambre de commerce France-Azerbaïdjan de l'époque, James Hogan; le sénateur André Reichardt; le directeur commercial de Thales Systèmes Aérien, Olivier Achard ou encore le directeur général de Total Azerbaïdjan, Marc Feuillade.


Fin décembre 2012, Rachida Dati donne une interview au média azerbaïdjanais Day.az, dans lequel elle fait un éloge de l'Azerbaïdjan, déclarant notamment que l'Azerbaïdjan "est un exemple pour le monde musulman tout entier", et regrette que la France et l'Union Européenne ne soit pas plus active aux côtés de l'Azerbaïdjan sur la question du Haut-Karabagh.

En octobre 2013, Rachida Dati félicite Ilham Aliyev pour sa "réélection" en tant que président d'Azerbaïdjan. Elle écrit dans cette lettre : "Cette élection confirme votre engagement pour votre pays, grâce à des réformes sociales dans de nombreux domaines. Je pense notamment à la campagne contre le chômage, aux pensions er aides sociales qui ont augmenté, aux investissements pour les infrastructures scolaires et sanitaires, ainsi qu’à la préservation du patrimoine culturel.".

En juillet 2014, Rachida Dati participe à une exposition intitulée "Azerbaïdjan : pays de traditions et d'avenir", organisée pour la deuxième année consécutive à Cannes par les autorités azerbaïdjanaises et la Fondation Heydar Aliyev. Rachida Dati est directement citée comme membre de l'Association des Amis de l'Azerbaïdjan, alors président par Jean-François Mancel, qui s'exprime également pour l'occasion.



Il n'est pas anodin non plus que, dans les archives du site Internet de l'Association des Amis de l'Azerbaïdjan, Rachida Dati soit présente sur plusieurs photographies aux côtés de Mirvari Fataliyeva, membre importante du lobby de l'Azerbaïdjan en France, et soit même citée.

Rachida Dati célèbre d'ailleurs la Fête nationale française, le 14 juillet 2014, à l'ambassade d'Azerbaïdjan, comme en témoignent les photographies prises durant l'événement.


En mai 2015, Rachida Dati, alors à Bakou, intervient de nouveau pour vanter les mérites de l'Azerbaïdjan. L'article la cite ainsi : "Mme Dati a déclaré qu’elle était une femme politique qui soutenait l’Azerbaïdjan sans réserve, ajoutant : « J’ai visité l’Azerbaïdjan à plusieurs reprises et je connais bien votre pays. L’Azerbaïdjan est un pays tolérant qui respecte les minorités nationales et religieuses, que ce soit au niveau local ou international. C’est vraiment une question très importante. Je suis très heureuse d’être en Azerbaïdjan. »"

En juin 2015, Rachida Dati appelle, dans un article publié par l'Agence de presse d'Etat d'Azerbaïdjan, au renforcement des liens entre la France et l'Azerbaïdjan, profitant du fait que l'Azerbaïdjan accueille alors la première édition des Jeux européens. Elle relativise la nature quasi totalitaire du régime azerbaïdjanais en affirmant : "On invoque les atteintes aux droits de l'Homme et on ne parle que de cela. Oui, tout n'est pas parfait en Azerbaïdjan. L’est-ce quelque part ? Oui, celle qu'on surnomme souvent la Perle du Caucase, a encore des efforts à faire."

En avril 2016 en marge de la Guerre des Quatre Jours, Rachida Dati participe, aux côtés de Jean-François Mancel et de Jérôme Bignon, à la rédaction d'un courrier à l'attention de François Hollande, dans lequel elle accuse l'Arménie d'avoir rompu le cessez-le-feu et récupère la rhétorique du régime d'Aliyev à propos du Haut-Karabagh, affirmant que la population arménienne indigène est coupable "d'occupation illégale".

Le lendemain de cette publication, Rachida Dati apparaît comme participante d'un événement organisé par un "Club Diplomatique" à Paris sur "l'environnement civilisationnel de l'Azerbaïdjan", au cours duquel elle vante la tolérance du régime d'Azerbaïdjan, l'invoquant comme "un exemple pour le reste du monde".

Le 15 avril 2016, Rachida Dati fait partie des signataires d'une lettre envoyée à François Hollande dénonçantles "provocations arméniennes" visant l'Azerbaïdjan. Parmi les signataires se trouvent également Nathalie Goulet, Jean-Marie Bockel, André Reichardt, Jean-Luc Reitzer, Sylvie Goy-Chavent, Jérôme Lambert, Jérôme Bignon, Jean-François Mancel et Christian Namy, tous membres actifs du lobby de l'Azerbaïdjan en France.

Début juin 2016, Rachida Dati est conviée à l'ambassade d'Azerbaïdjan à l'occasion d'une fête organisée par la société nationale des pétroles de la République d’Azerbaïdjan (SOCAR), la veille du lancement de l'Euro 2016 de football, dont la société est partenaire officiel. Rachida se rend à la soirée, et loue la "tolérance" de l'Azerbaïdjan ainsi que les "contributions" de la Fondation Heydar Aliyev à la culture. Elle semble particulièrement proche de la secrétaire générale de l'Association des Amis de l'Azerbaïdjan, Mirvari Fataliyeva.



En septembre 2016, aux côtés de Mehriban Aliyeva et de membre du lobby de l'Azerbaïdjan en France comme Jean-François Mancel, Rachida Dati participe à l'inauguration du Village d'Azerbaïdjan, événement de propagande pour le régime d'Aliyev organisé en plein Paris, place Joffre, dans le 7ème arrondissement dont elle dirige la mairie.


En juillet 2017, Rachida Dati, avec deux autres députés européens, Ivo Vajgl et Iveta Grigule, publient un communiqué pour dénoncer les "crimes militaires arméniens". Le texte affirme notamment que « en tant que personnalités politiques européennes, nous devons également demander à l'Arménie de cesser au plus vite la prise d'otages civile, car elle est illégale et un symbole de lâcheté, pour des revendications politiques à la fois injustifiées et illégitimes".


Dans la foulée, elle cosigne un courrier à Emmanuel Macron, aux côtés des autres lobbyistes de la dictature azerbaïdjanaise, notamment : Jean-Marie Bockel, Jean-Pierre Door, Jérôme Lambert, Jean-Luc Reitzer, André Villiers, André Reichardt, Nathalie GOULET, Jérôme Bignon, Éric Dolige, Sylvie Goy-Chavent, Alain Houpert, Christian Namy, Alain Vasselle, Jean-François Mancel, Yves Albarello, Yves Foulon, Georges Fenec et Jean-Marie Tetart. Le propos est quasiment le même que celui du communiqué publié le même jour avec les députés européens, mais rassemble ici la fraction politique du réseau d'influence azerbaïdjanais en France.

En avril 2018, Rachida Dati cosigne un communiqué félicitant la nomination de Novruz Mammadov au poste de Premier Ministre d'Azerbaïdjan. Parmi les signataires figurent de nombreux membres de l'Association des Amis de l'Azerbaïdjan : Jean-François Mancel, Jean-Pierre Allali, Hedva Ser, Pierre Thilloy, Jérôme Béguin, Guy Chevalier, Mirvari Fataliyeva, Patrick Gendraud, Michel Gourinchas, Jean-Pierre Guinhut, Robert Hossein, Alain Houpert, Thierry Mariani, Christian Poncelet, Jean Perrin, Danielle Rousseau, Benoît Sadry, Jean-Marie Tetart et André Villiers.


Enfin, en mai 2018, Rachida Dati félicite l'autocrate Ilham Aliyev à l'occasion de sa "réélection", feignant de croire (ou y croyant réellement?) à cette farce démocratique en écrivant que "le renouvellement de la confiance d’une large majorité de citoyens azéris à votre égard confirme votre leadership et salue les avancées économiques et sociétales réalisées en Azerbaïdjan depuis le début de vos mandats". Elle signe sa lettre en concluant "Soyez assuré, Monsieur le Président de la République, de mon soutien fidèle pour toutes les politiques que vous continuerez de mettre en œuvre pour l’Azerbaïdjan et son peuple".

La diffusion du reportage de Cash Investigation "Mon président est en voyage d’affaires" en septembre 2015 ayant terni sa réputation, Rachida Dati se fait, à partir de 2017-2018, plus discrète et expose sensiblement moins ses liens avec les représentants de la dictature d'Azerbaïdjan et de sa famille régnante. Il est toutefois à souligner qu'elle reste un ami de l'autocratie, et est considérée comme telle par ses envoyés, notamment Mirvari Fataliyeva, qui sur les réseaux sociaux loue le programme de la candidate à la Mairie de Paris.

Enfin, elle apparaît aux côtés d'une autre lobbyiste de l'Azerbaïdjan en France, Adela Naibova, en janvier 2024, lors des voeux à la Mairie du 7ème arrondissement de Paris.

Un article publié par le média azerbaïdjanais Report.az le 24 janvier 2024 évoquait Rachida Dati en ces termes : "Amie de longue date de l’Azerbaïdjan et politicienne avisée et habile, Mme Dati a noué des liens avec l’Azerbaïdjan au cours de la dernière décennie. Son soutien à l’Azerbaïdjan laisse entrevoir la possibilité d’un lien singulier au sein du nouveau gouvernement français qui pourrait s’avérer être une possibilité de restaurer les relations entre les deux pays qui ont subi des dommages massifs au cours des quatre dernières années".

Ainsi, si Rachida Dati apparaît moins aux côtés des pontes du lobby azerbaïdjanais en France actuellement, elle n'en agit sans doute pas moins en coulisses, et ses liens avec la dictature d'Aliyev - encore bien actuels - ne doivent pas être oubliés.